La « Grande vague » et le 400e : il faut que cette exposition sur les familles pionnières vienne à Québec en 2008

La Grande Vague

par Alain Lavallée

(ajout juin 2010, texte original du 6 octobre 2008 est à la suite de cet ajout)

La « Grande vague » de Marc Lincourt, préparée en France pour le 400e de Québec en 2008, a finalement pu venir au Québec, mais près de 2 ans plus tard.

Elle a été présentée à Montréal du 2 février au 18 avril 2010 (édifice des Archives du Québec, Bibliothèque nationale, rue Viger).

Elle est actuellement au Musée de la Côte Nord à Sept-Îles du 13 juin au 5 septembre 2010.

Pour ceux qui veulent connaître cette exposition et tenter de comprendre pourquoi elle n’a « mystérieusement (?) » pu venir au Québec en 2008 dans le cadre du 400e, il faut comprendre toute la dynamique du 400e.

De fait ce projet artistique a rencontré en 2008 sur son chemin les obstacles de la « Politique canadienne de commémoration uniforme » (PCCA), préparée en 2003 par le gouvernement fédéral sous l’égide de M. Jean Chrétien et de sa ministre de Patrimoine Canada, Mme Sheila Copps.

Comme nous l’avons montré dans une communication sur l’organisation du 400e, la Politique canadienne de commémoration uniforme, administrée par Patrimoine Canada, a  classé la commémoration des origines françaises des pionniers de la Nouvelle-France comme étant non conforme à la commémoration de valeurs canadiennes uniformes.

D’ailleurs, le gouvernement du Canada avait inscrit sur son site web que «Fêter Québec, c’est aussi fêter le Canada et les citoyens de toutes origines». La volonté du gouvernement fédéral de promouvoir le multiculturalisme canadien a coïncidé avec le refus, par la Société du 400e, d’un grand nombre de projets de commémoration des origines françaises des pionniers, en particulier à partir de mars 2007. 

(pour une liste de ces projets non acceptés dans les commémorations en 2008, dont celui de la « Grande Vague, » vous pouvez aller lire la 2e partie de la communication que j’ai faite à Grenoble en juin 2009, la première partie explique toute la dynamique des tensions entre les gouvernements du Québec et du Canada, entre 2000 et 2008 au cours de la préparation de ce 400e.

http://www.pacte.cnrs.fr/IMG/html_COMLavallee.html

Le texte définitif de cette communication est paru en août 2010 dans le numéro 68 la revue « Études canadiennes/Canadian studies » qui est publiée par l’Association française d’études canadiennes.

mais je vous invite à lire  d’abord le texte ci-dessous décrivant cette exposition de la Grande Vague:

 
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I  –  La Grande vague,

                                                 ou la « Mémoire de l’eau salée »

La Grande vague est une exposition artistique qui a été préparée spécifiquement pour le 400e anniversaire de Québec par l’artiste Marc Lincourt. Cette oeuvre de 2 mètres par 10 mètres évoque une vague qui se gonfle. Elle évoque cet océan qu’ont traversé Champlain et les familles pionnières venues de la France qui se sont installées à Québec, il y a 4 siècles.Cette œuvre d’art est formée de 400 morceaux, en référence au 400e. Chaque morceau est marqué d’un nom qui désigne soit un métier (boucher, marchand, mercier, pelletier…), un titre (cardinal, le duc, l’évesque, roy…), un lieu (beau pré, des jardins, la pointe, paradis…), etc.  Comme vous l’avez deviné, chacun de ces 400 noms est aussi le nom d’une des familles pionnières originaires de France au XVIIe siècle qui ont fondé Québec.Chacun de ces 400 morceaux est un livre, donc une mémoire : mémoire de l’eau salée, parce que mémoire d’une traversée de l’océan, souvent périlleuse. Il est estimé qu’environ 10% des aventuriers s’y risquant auraient perdu la vie lors de cette traversée vers Québec: naufrages, accidents, maladies.  Mémoire de l’eau salée parce que mémoire des sueurs et des larmes de ceux et celles qui ont fondé Québec, larmes de joie, larmes de peine des membres de ces familles Boucher, Roy, Marchand, Pelletier, Desjardins, Lévesque… qui ont construit Québec. (Bien entendu, un siècle et demi plus tard, Anglais et Écossais, deux siècles plus tard, Irlandais, ont aussi marqué la construction de Québec, les Amérindiens ont de tout temps contribué à façonner Québec et la Nouvelle-France, mais il me semble aussi raisonnable que l’on puisse profiter de ce 400e pour se rappeler la contribution des familles pionnières venues très très majoritairement de France.)

Cette exposition artistique préparée pour le 400e de Québec a été présentée à divers endroits en France. À Paris, cette exposition a eu lieu au Centre culturel canadien. Le premier ministre Harper y a d’ailleurs assisté au vernissage à la fin mai. Elle a été présentée entre autres à Brouage, où est né Samuel Champlain. Elle suscite beaucoup d’émotions chez les descendants québécois de ces familles françaises du XVIIe siècle comme le montre ce témoignage:
«  »Marie Allard a éclaté en sanglots en voyant son nom de famille écrit noir sur blanc sur un mur dédié aux familles souches de la Nouvelle-France, à Brouage. Et l’émotion a été encore plus forte lorsqu’elle a retrouvé son nom sur La grande vague, une œuvre de Marc Lincourt exposée dans la poudrière de la Halle aux vivres. (…) Tout de suite, elle a voulu toucher à ce nom en trois dimensions peint sur le livre de sa famille. « Merci! », a-t-elle lancé, les larmes aux yeux. (Une Grande vague qui porte 400 familles, Julie Lemieux, Le Soleil, 24 mai 2008) » ».

Je vous invite à visiter le site internet           www.lagrandevague.com      vous y trouverez des informations sur cette exposition et peut-être que par curiosité vous aurez envie de découvrir les 400 noms de famille qui sont évoqués par cette œuvre sur les familles pionnières (vous n’aurez qu’à cliquer sur l’onglet « les 400 noms ».)

Vous pouvez aussi visionner un petit vidéo de Marc Lincourt le créateur de cette exposition qui explique l’origine de sa démarche et de cette exposition (durée: 3 minutes et demie).

http://www.dailymotion.com/relevance/search/Marc%2BLincourt/video/x5l1xx_080527les-origines-de-la-grande-vag_creation

II -La Grande vague à Québec en 2008 (?):        

   flux et reflux d’une exposition


Préparée pour le 400e cette exposition avait été placée sur la liste des événements officiels du 400e en novembre 2007. Puis, en coulisses elle fut retirée de cette liste. Pourquoi?
En mai dernier, de nouvelles démarches ont été entreprises cette fois afin que cette exposition soit présentée en octobre pendant le sommet de la francophonie. Voici des précisions sur ces démarches :  en mai dernier à La Rochelle, le maire Régis Labeaume propose à Marc Lincourt de prendre le relais et de faire venir La Grande Vague. On s’entend sur le mois de décembre.

Peu après, la ville contacte même l’agent de Lincourt, Frank Pinon qui dirige l’association Les Passeurs de lettres, pour accélérer les choses. Québec souhaite maintenant présenter l’oeuvre en octobre, pendant le sommet de la Francophonie. Un lieu est même confirmé: la Maison des métiers d’art de Québec, dans le quartier Saint-Roch. Le 17 juin, l’avant-dernier courriel de Jean-Michel Choquette, conseiller cadre de la ville au Commissariat du 400e, affirme qu’il ne reste plus que quelques détails à régler pour «finaliser les arrangements».

Le courriel suivant, le 8 août, a été plus laconique. Il annonce à Pinon que le projet est enterré faute d’argent. Au passage, il qualifie l’oeuvre de «magistrale». » » » » »(Christian Rioux, « La Grande vague se brise sur Québec », Le Devoir, 20 septembre 2008, A8).

La Grande vague a été emportée une deuxième fois, rayée de la liste des événements du 400e, officiellement pour des raisons financières. Curieux tout de même, les événements concernant les familles pionnières ont de la difficulté à se réaliser dans le cadre du 400e. Nous allons régler une question rapidement. Cette deuxième annulation de la présentation de la Grande vague n’est pas due à des problèmes d’argent, pas plus que la première annulation d’ailleurs. Comme je l’ai écrit dans une lettre envoyée au Soleil et publiée sur le site web de cyberpresse.ca le 28 septembre 2008 :
« « La Société du 400e dispose d’un million de dollars qu’elle prévoit dépenser afin de préparer le spectacle de clôture du 400e le 31 décembre.  La Société du 400e ne peut dire qu’elle n’a pas d’argent pour accueillir l’exposition la « Grande vague » à Québec. Le coût de cette exposition est de 30 000$. Le financement de la venue de cette exposition ne sera pas difficile à trouver, il suffit de lancer quelques pièces pyrotechniques de moins. » »

http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/opinions/carrefour/200809/26/01-23951-il-faut-amener-la-grande-vague-a-quebec.php
La facture affichée pour que cette exposition ait lieu à Québec soit 30 000$ n’est que pour le coût de transport. Les coûts de réalisation de l’œuvre ont été défrayés par Frank Pinon (entre autres grâce à l’aide du Conseil général de Charente-Maritime).

J’avoue que je ne suis pas dans le secret des dieux au sujet des événements du 31 décembre, pour lesquels la Société du 400e a mis de côté 1million de dollars, mais ce n’est certainement pas très difficile de retirer un 30 000 ou un 40 000$ de ce budget pour le consacrer à la présentation de cette exposition. On a souligné l’apport de Champlain, mais rappeler celui des familles fondatrices qui ont construit Québec, c’est aussi très important. Québec ne s’est pas faite seule que je sache.

J’ai suggéré à la blague de lancer moins de pièces pyrotechniques lors du spectacle du 31 décembre prochain afin de financer la venue de la Grande vague à Québec. Il est vrai que les Québécois sont friands de feux d’artifice. L’immense méga foule du 3 juillet dernier qui s’est massée sur les rives du fleuve pour admirer le feu d’artifice géant de l’anniversaire de la fondation en témoigne.  Mais bon ce record ne sera pas égalé, alors quelques pièces de moins et la qualité de l’air n’en sera qu’améliorée (voir la note en bas de page)
Il est certain que j’écris cela un peu à la blague, mais en même temps il est tout aussi certain que du un million de dollars planifiés il est possible d’en retenir 30 000 $ afin d’amener la Grande vague à Québec en 2008. Les deux annulations de la présentation de cette exposition ne sont pas dues à des problèmes monétaires. Il est encore possible de faire venir cette exposition à Québec en 2008, l’artiste et son agent le souhaitent ardemment, et les Québécois pourraient en profiter. Vous pouvez-les rejoindre via leur site www.lagrandevague.com ou bien convaincre la Société du 400e de revenir sur sa décision.

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Note: feu d’artifice et qualité de l’air
Des mesures récentes ont montré que les feux d’artifice causaient des problèmes aux personnes souffrant de problèmes respiratoires. Lors des feux qui ont lieu à La Ronde à Montréal, « « la station de surveillance de la qualité de l’air d’Hochelaga-Maisonneuve a mesuré des concentrations de particules fines respirables jusqu’à 10 fois supérieures à la normale dans l’heure suivant le début des prestations pyrotechniques. (…) les concentrations anormalement élevées de polluants peuvent être nocives pour la santé respiratoire des habitants du quartier ainsi que des spectateurs.
(D. Cameron, Feux d’artifice de La Ronde, Des sommets de pollution atmosphérique, Le Soleil, samedi, 19 juillet 2008, p. 26).)